Bravo !!!

 

Cet article, rédigé par des élèves de 1ère ES 1 au lycée M. Berthelot de Questembert dans le Morbihan, a reçu le 1er prix du concours organisé par le CLEMI, en partenariat avec le magazine Causette, Les nouvelles news et TV5Monde. Ce concours donnait carte blanche aux collégiens et lycéens pour "déconstruire les stéréotypes sexistes.

Site du Clemi pour aller voir le travail des autres lauréats du concours.

Fille en jogging à quoi ça rime ?

Les élèves de 1ère ES 1 mènent l'enquête au lycée de Questembert.

Les filles revêtent leur jogging et rentrent sur le ring : au quotidien, les filles doivent se battre pour affronter les jugements.

 

Une enquête de terrain pour mieux comprendre le phénomène...

 


"T’es en jogging toi ?"

Aujourd’hui, au lycée, tout le monde est généralement habillé pareil. Filles comme garçons nous optons principalement pour une tenue jean-basket. Cependant, parfois les garçons adoptent un style plus décontracté en portant des joggings. Avant, nous n’avions jamais vraiment prêté attention à cela, jusqu’au jour où l’une d’entre nous est-elle-même venue en jogging au lycée. Lorsqu’ Héloïse s’est habillée ainsi elle ne s’attendait pas à autant de réactions et de remarques.

« T’es en jogging toi ? »

« C’est pour les mecs ! »

Round 1 : ACTION !

Suite à ce genre de réactions, nous en avons parlé entre nous et avons décidé de reproduire la chose afin d’analyser le comportement de nos camarades face à ce style vestimentaire qui ne nous semblait pas si choquant. Nous avons alors mis l’expérience en place (1). Durant deux semaines, chaque jour, une personne de notre classe se mettait en jogging et notait les remarques et les attitudes qu’avaient les personnes à son égard. Nous avons fait attention à distinguer les remarques féminines des masculines.

(1) Il est important de préciser que cette enquête a été réalisée dans un lycée « rural » (à Questembert dans le Morbihan) où les normes sont sans doutes  différentes de celles d'un lycée périurbain. Peut-être que si nous avions mené notre enquête en banlieue, là où le port de jogging est, on le suppose, plus fréquent chez les femmes, les réactions auraient été sans doute moins marquées...


Round 2 : RÉACTIONS ?

Nous avons alors pu constater que les garçons et les filles réagissaient différemment lorsqu’une fille portait un jogging : les garçons avaient tendance à exprimer leur jugement par la parole, en cherchant à se moquer ouvertement :

« Bah tu as sport aujourd’hui ? »

« T’as oublié d’enlever ton pyjama ? »

« Aucune meuf peut se mettre en jogging sauf des moches »

« C'est désespérant ! »

« Çà choque pour une fille »

« T'as eu la flemme de t'habiller ?»

« Oh le swag » (ton ironique)

« Çà fait wesh-wesh »

Les filles, quant à elles, regardaient de haut en bas tout en émettant des critiques mais de manière détournée, sans s'adresser directement à la personne. Des élèves de la classe infiltrées parmi les « médisantes » ont pu recueillir les propos tenus dans le dos des cobayes :
« C’est quoi cette mode ? »

« Comment elle est habillée, elle ? »

« Çà me choque d'elle qu'elle mette des joggings ! »

Ces réactions nous semblent étonnantes dans le sens ou les filles sont à la fois victimes et bourreaux : les filles sont critiques envers les autres filles qui sortent de leur « rôle social acceptable », alors qu’elles sont elles-mêmes les premières victimes de ce stéréotype. Le contrôle social est d'autant plus fort qu'il touche des personnes qui nous ressemblent.

Nous avons également remarqué que les garçons de notre classe ayant participé à l’expérience n’avaient suscité aucune réflexion de la part de leurs pairs.

Round 3 : MATCH NUL ?

Suite à l’analyse de ces remarques, nous avons conclu qu’il existait bel et bien un code vestimentaire différent selon notre sexe et qu’il y avait des normes et valeurs à respecter si nous ne voulions pas être stigmatisées comme garçon manqué, fille négligée ou encore « racaille ». Les normes et les valeurs de notre société font paraître la fille comme « déviante » lorsqu'elle porte un jogging. C'est-à-dire que l’on est caractérisé comme différent et ne rentrant pas dans un cadre donné.

« ça fait gitan, pouilleux ! »

« On dirait une racaille ! »

« En mode bat les couilles ! »

Nous pouvons affirmer que l’élégance vestimentaire est un critère dans le rôle social de la femme. Ainsi a pu s'en rendre compte Cécile Duflot en juillet 2012 quand elle arriva à l'assemblée nationale vêtue d'une robe printanière et non en « tailleur » tel que l'impose la panoplie de la ministre. Sifflée par les députés masculins , on lui a rapidement rappelé le « rôle » qu'elle avait à tenir. On peut ainsi penser que l’homme peut se permettre plus de chose que la femme : dans notre cas, porter un jogging sans être jugé.

Nous avons tenu tête face aux remarques reçues, mais n'avons pas réussi à faire changer d'avis ceux qui nous jugeaient. Les normes évoluant avec la société, c'est peut être le temps, notre patience, et surtout le fait de ne pas « céder » qui modifieront le regard porté sur la femme.

Il faut donc être armée d'une bonne dose de courage pour boxer les stéréotypes hors du ring quand on veut être une fille qui s'assume !

 

Par les élèves de 1ère ES1 du lycée Marcelin Berthelot de Questembert

Pour aller plus loin... contre les stéréotypes sexistes !

CI-dessous, le collage ayant obtenu le 1er prix du concours sur la déconstruction des stéréotypes sexistes, dans la catégorie arts plastiques :

A voir !

Ci-dessous une vidéo réalisée par le réseau Toutes femmes, toutes communicantes qui cherche à lutter pour la place des femmes dans le monde du travail. Pascale Boistard, alors secrétaire d’État chargée des Droits des femmes, marraine le projet ! C’est donc tout à fait sérieux, comme l’indique le dossier de presse :

« Les clichés ont un réel pouvoir toxique. Ils engendrent jugements hâtifs, reproduction sociale, automatismes à faible pensée et comportements injustes… Combattre les clichés crée beaucoup de bienfait pour la société, car ils détruisent de la valeur, en maintenant les statu quo dans les organisations et abîmant la confiance. »